Dans sa vie, il pleuvait, il ne faisait que pleuvoir. Triste Macondo où l’on purge cent ans de solitude… Un jour, pour s’évader du quotidien et de sa monotonie, il décida de peindre. Il enfila une vieille blouse, rassembla couleurs et pinceaux et barbouilla une palette. Puis il commença à peindre les vitres de la fenêtre.
Comme il rêvait d’immensité, il dessina la mer. Il choisit un bleu profond, le bleu maritime. Un bateau à voile blanche apparut bien vite car le vent soufflait toujours très fort. On ne voyait ni rivage, ni aucune plage de sable fin. Rien qui limitât son imagination. Il voulait dépasser les marges, mais il se heurta au cadre.
Il peignit alors une abondante chevelure verte comme les algues. Tous ses désirs inachevés, ses rêves inassouvis, tout ce trop plein de fantaisie se déversait maintenant dans son tableau en une cascade infinie. Alourdi par le poids des souvenirs, il peignait la nostalgie des jours d’autrefois, mèche après mèche.
Se rappelant les réalisations heureuses de sa jeunesse, il ajouta quelques teintes plus claires, figurant des fils clairsemés dans cette masse verte et brune. Son petit voilier filait toujours au fond de l’horizon. C’est alors que se profila doucement un arc-en-ciel, dans des tons pastel. Il sautait de couleur en couleur comme dans les cases d’un jeu de marelle.
Dehors le soleil brillait. Il ouvrit la fenêtre et huma l’odeur fraîche de la terre humide et chaude. Il cligna des yeux en voyant l’azur étincelant après la pluie. Il lui semblait voir s’ouvrir les portes du Ciel.
couleurs estivales –
dans l’atelier du peintre
palette abandonnée
Publié dans la revue « L’Echo de l’étroit chemin »